Ce livre ne commence pas par des théories. Il commence par une rencontre : celle de Luis Cercos et de François Le Cler de La Motte-Rouge.
Le premier est historien de l’art, restaurateur d’architectures et conservateur de patrimoines. Bâtisseur de bibliothèques, autodidacte, formé à la rigueur de la patience et de l’action. Un aventurier, au sens moderne du terme. Il travaille sur des ruines et des lignes que le temps a voulu effacer, sans y parvenir. On l’appelle pour raviver, jamais pour ressusciter. Il agit sur ce qui n’est pas encore mort. Sa voix est celle de celui qui s’anoblit par ce qu’il fait, et non par ce qu’il hérite.
Le second est polyglotte, érudit, élevé parmi les langues et les bibliothèques. Il n’a pas besoin de signer de plans ni de soulever des pierres. Sa tâche est ailleurs : écouter, traduire, corriger, préserver la forme juste des idées. Comme Jacques le fataliste, il accompagne ; comme Íñigo Balboa, il témoigne.
Nous nous sommes rencontrés au moment où l’écriture est devenue elle aussi une forme de restauration. Quand les articles, les discours, les livres ont réclamé une seconde voix : non pour répéter, mais pour traduire en parallèle, comme deux mains qui restaurent une corniche depuis les extrémités opposées de l’échafaudage.
Depuis, nous écrivons ainsi. L’un depuis la matière ; l’autre depuis la parole.
L’un avec la lame nette et le regard ferme ; l’autre avec la plume attentive et la loyauté sans éclat.
Ce livre s’intitule Restaurer à l’ère des machines. Non par nostalgie, mais par nécessité. Car à l’époque du vertige, du jetable, de l’instantané, nous pensons que restaurer est un geste politique. Une manière de penser, d’agir, de résister.
Paris, mars 2025
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